Voici une photo de la prison de St-Gilles prise en 1973. Cette prison est intégrée au tissus urbain : on aperçoit derrière la maison communale (la “mairie” pour mes amis Français).

 

Prison de Saint-Gilles - Vue aérienne

 

L’architecture de cette prison est basée sur le panoptique tel qu’imaginé par le philosophe utilitariste Jeremy Bentham au XVIIIe siècle. Ce dispositif particulier vise à créer « un sentiment d’omniscience invisible » chez les détenus (ils ne peuvent voir qui les observe mais peuvent être observés à tout moment). La rationalisation de l’espace vise ainsi à transformer l’individu.

 

 Prison de Saint-Gilles 

 

À l’intérieur d’une enceinte rectangulaire, la prison de St-Gilles est constituée d’une tour centrale à partir de laquelle partent cinq ailes. Le Centre peut ainsi observer ce qui se passe dans chacune des ailes et gérer les allers et venues des détenus. Lorsqu’on veut rencontrer un détenu ou pour ouvrir une porte, il faut en faire la demande au Centre. Chaque aile est composée de trois sections (les trois étages) et donne sur un préau en forme de cercle où les détenus peuvent faire du foot ou… « tourner en rond ».

En écrivant cela, j’ai songé au fameux tableau de Van Gogh « La ronde des prisonniers » (peint en 1890 d’après une gravure de Gustave Doré).

 

La ronde des prisonniers, de Van Gogh

 

La première chose qui a attiré mon regard, ou plutôt qui y a fait obstacle, c’est la présence des murs, tout proches. Des prisonniers font la ronde dans ce préau sombre et oppressant. Cercle mortel au sein d’une cours carrée, tout est fait pour que chacun soit uniforme. Puis, le regard est attiré par ce seul prisonnier n’ayant pas de bonnet. Ce prisonnier ne soutient pas ses mains dans son dos ou ses poches, son visage dressé est le seul qui semble prendre la lumière. Je ne sais qu’y voir… un reproche à l’observateur impuissant, un air frondeur, un regard de défi, de fierté ? Un élan de singularité ?